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mercredi, 13 septembre 2006

Pierre Castagnou

Le Maire du 14e arrondissement, également Conseiller de Paris (PS), a accepté de répondre à nos questions.

 

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Quel est votre sentiment général sur ce dossier ?

 

L’affaire dure depuis longtemps. Il est temps de trouver un dénouement. La ferme fait  pleinement partie de notre patrimoine et de l’histoire de Paris. Il n’y a d’ailleurs pas que la ferme. La parcelle comprend le sous-sol avec la carrière du chemin de Port-Mahon et l’aqueduc gallo-romain, le sol, la ferme de Montsouris proprement dite (que le nouveau propriétaire s’acharne à appeler la grange). Il y a aussi les bâtiments qui donnent villa Saint-Jacques, le pavillon troubadour et les bâtiments qui donnent rue de la Tombe-Issoire, tout cela fait partie d’un ensemble qu’il faut absolument préserver.
Je me suis saisi de cette affaire dès le début, dans les années 90. Je n’étais pas encore maire. J’étais un simple Conseiller de Paris qui siégeait dans l’opposition. Face aux projets immobiliers dont le site faisait l’objet, j’ai convaincu le ministre de la culture, qui était alors Jack Lang et que je connaissais bien, de classer la carrière du chemin de Port-Mahon au titre des monuments historiques.
Ce classement s’est révélé essentiel. Sans lui, nous aurions beaucoup de mal à nous opposer aux différents projets immobiliers qui se sont succédés. C’est, sur ce classement qu’avec le Collectif de Port-Mahon, et avec tous ceux et toutes celles qui se sont mobilisés autour de lui, qu’après 2001, au niveau municipal, nous nous sommes appuyés pour rejeter les demandes de permis de la Soferim. Il n’y a d’ailleurs pas que la carrière qui est classée, mais aussi le sol.
Depuis 5 ans, nous (et quand je dis nous, j’entends l’ensemble de la majorité municipale du 14e, la Ville de Paris et le Maire de Paris, Bertrand Delanoë, qui suit cette affaire personnellement) sommes aux côtés du Collectif de Port-Mahon pour déjouer les manœuvres de la Soferim.
Nous avons évité le pire, nous avons gagné des batailles, mais la guerre n’est pas terminée. C’est une affaire qui a connu de nombreux rebondissements. Il y a eu le changement de propriétaire, l’expulsion des occupants, plusieurs projets, autant de demandes de permis… Le projet du promoteur évolue. Il veut réaliser des logements de standing, puis une résidence étudiante. C’est très bien que la Soferim se soucie du logement étudiant, mais ça a fait long feu, parce que, aux dernières nouvelles, la Soferim projetterait de réaliser une résidence pour personnes âgées… Tout cela n’est pas sérieux.
La Ville a proposé à la Soferim d’acquérir la ferme pour enfin trouver une solution satisfaisante pour tous. Elle a même préempté. Mais la Soferim a refusé. Elle finira peut-être par accepter, ne serait-ce que sous l’effet de ses contraintes financières parce qu’il a investi, mais pour l’instant, il n’en a tiré aucun avantage. C’est un promoteur-constructeur dont les considérations sont financières et seulement financières. Je suis étonné par son entêtement. Il doit bien bénéficier d’appuis quelque part !
En tout cas, pour l’instant, dès que la Ville refuse un  permis de démolir ou de construire, le promoteur s’empresse d’en déposer de nouveaux. La Soferim a attaqué la décision de préemption de la Ville qui a été déboutée en 1ère instance. La Ville a fait appel. Nous attendons le jugement. Le combat continue. Il ne faut surtout pas se démobiliser, il faut faire preuve d’une vigilance de tous les instants face à la Soferim et à ses manoeuvres.

 

Le Collectif plaide pour une protection au titre des Monuments Historiques ou pour une Protection Ville de Paris, de la dernière ferme de Paris (c’est-à-dire de la grange, de l’immeuble sur rue du 26 qui est l’entrée de cette ferme de ville, de la cours de ferme, du Pavillon Troubadour, de la Maison des Vachers et de l’aqueduc Gallo-Romain). Qu’en pensez-vous ?

 

Oui, nous l’avons vu, si le classement de la carrière a permis de repousser les projets immobiliers de la Soferim, il est aussi apparu nécessaire de mieux protéger tous les éléments du site.
C’est tout le sens des dispositions édictées dans le cadre nouveau PLU qui a été adopté par le Conseil de Paris le 12 juin dernier. A la demande de la Mairie du 14e la parcelle fait désormais l’objet de plusieurs mesures de protection :
1/ Le bâtiment de la ferme bénéficie désormais de la « Protection Ville de Paris ».
2/ Le site a été classé en emplacement réservé pour un équipement culturel.
3/ La cour a été inscrite en Espace Vert Protégé (EVP) et Espace Libre à Végétaliser (ELV).
4/ La porte charretière de l’immeuble, qui donne sur la rue de la Tombe-Issoire a été classée Elément Particulier Protégé (EPP).
5/ Au 15, villa Saint-Jacques, une Volumétrie Existante à Conserver (VEC) inscrite sur les bâtiments en bordure de voie et,
6/ au 17, villa Saint-Jacques, un filet de hauteur limitent drastiquement toute possibilité de construction.
Je crois qu’on pouvait difficilement aller plus loin dans la protection de ces bâtiments et de ce site. Nous sommes armés aujourd’hui pour refuser les permis de démolir et les permis de construire mais aussi toutes autorisations de travaux qui altéreraient le site. C’est d’ailleurs ce qu’a fait cet été le Maire de Paris quand la Soferim a déposé trois demandes de permis de démolir. J’ai très vite donné un avis défavorable et la Ville de Paris a suivi ma position.

 

Le Collectif se bat pour une restauration de tous les bâtiments de la parcelle. Qu’en pensez-vous ?

 

La Ville souhaite restaurer l’ensemble du bâti et notamment la ferme qui date du 19e siècle. Il importe de trouver rapidement trouver un accord avec la Soferim de telle sorte qu’elle donne suite à l’offre d’achat de la mairie. Il ne faut pas attendre que la ferme devienne une ruine, ce qui compromettrait sa restauration ! Mais c’est peut-être malheureusement le calcul de la Soferim.
Au-delà de la protection du patrimoine et de la restauration du bâtiment, nous voulons valoriser cet élément remarquable de l’histoire de Paris en en faisant un lieu vivant. D’où notre projet de faire de la Ferme de Montsouris un équipement culturel. Cela répond à un besoin des habitants et des associations dans ce quartier qui n’en dispose pas. Bien entendu, le projet devra faire l’objet d’une large concertation entre la Mairie, le Collectif et les associations pour définir le contenu du programme. Nous voulons aussi restaurer les autres bâtiments pour y réaliser une quinzaine de logements sociaux dans un secteur où il y en a peu. Conserver un usage collectif et social correspond bien à la volonté initiale de l’Abbé Keller !
J’espère vraiment que la solution de l’acquisition va aboutir. Nous avons demandé une nouvelle estimation aux domaines, compte tenu des nouvelles dispositions du PLU, parce que évidemment la valeur foncière et immobilière varie en fonction de ce qui est inscrit au PLU. Compte tenu des protections désormais assurées, je conçois mal que la Soferim s’entête à vouloir construire sur cette parcelle. Cette parcelle est quasiment devenue inconstructible. On peut faire avec les bâtiments existants, mais on ne peut rien construire de nouveau.

 

Voulez-vous ajouter quelque chose ?

 

Ce dossier est pour moi un dossier emblématique pour le 14e et pour Paris. Emblématique par son ancienneté, par ses enjeux, parce qu’il s’agit de la défense du patrimoine, parce qu’il s’agit aussi de faire prévaloir l’intérêt général porté par la volonté de la municipalité parisienne.
La ferme Montsouris est un combat, vraiment commun, entre le Collectif qui représente une trentaine d’associations, et la Mairie du 14e. Je crois pouvoir dire, et je m’en félicite, car ce n’était pas acquis d’avance, qu’à chaque étape, nous avons discuté, et nous nous sommes mobilisés pour le même combat. Je sais qu’il est arrivé que le Collectif puisse s’interroger sur la capacité du Maire du 14e à convaincre le Maire de Paris. Moi-même, d’ailleurs, au départ, je n’étais pas sûr de pouvoir le convaincre. Il a fallu vaincre quelques résistances dans le milieu municipal. Mais les victoires acquises en ce domaine, même si nous n’avons pas encore abouti, sont de bon augure.
Je souhaite que cette affaire se dénoue d’ici à la fin de cette mandature. Mais la Ville n’est pas seule à décider, il y a deux parties. En tout état de cause si la Soferim se décide à vendre, c’est un projet qui concernera la prochaine mandature. Nous serons alors amenés à travailler ensemble pour mettre au point et réaliser le projet porté par la Ville de Paris et la Mairie du 14e.

 

Nous vous remercions.

 

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